Onze

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Projets. Certains très lisibles, d’autres très illisibles, la tête dans les nuages, ce que ça fait de se disperser pendant autant d’années, et est-ce que c’est fini ?

Il y a ceux qui aiment avoir mon attention le plus souvent possible, et ceux qui préfèrent se faire oublier, comme si ça les dispensait d’aboutir. Il y a ceux qui traînent depuis aussi longtemps que je m’appelle griz, et ce sont eux, les plus vieux qui sont restés les plus jeunes et les plus immatures.

Il y a ceux qui désobéissent sans arrêt. Qui ne respectent jamais les limites que j’essaie de leur fixer. Pas trop de digressions, ni trop de répétitions. Pas trop de perso ni d’abstrait Pénélope, apprends-moi à tisser.

Il y a ceux qui s’étirent un peu plus en longueur, une page en suivant une autre, en marche vers les cent cinquante, surprise. Parce_que ne pas écrire plus que quinze minutes par ci- par-là, avec autant d’égards qu’une allumeuse pas très sure de son coup, et voilà le résultat.

Gardés pour moi. Tous ces mots. Ouvrir les documents des années après, taper un peu sur les touches, avant de refermer, pendant quelques années de plus.

Entassés pour moi. Certains jours, c’est rassurant. D’autres, moins. J’ai souvent pensé que ça prenait du temps de devenir, d’être plus impliqué(e), d’achever (ne pas rayer, il n’y a pas de mention inutile). J’aime bien l’idée qu’être écrivain, c’est quand on est prêt à assumer, publiquement. En attendant, autant rester auteur. Il y a une différence entre les deux qui me semble assez juste, et qui évite de confondre, et de se retrouver à devoir enfiler un costume dans lequel on ne se sentirait pas à l’aise, quand on aime se dire que le manque d’obligation est un passe-droit pratique.

Aujourd’hui, est-ce que j’ai envie d’autre chose ? Oui, un peu. J’ai envie de terminer, de pouvoir dire que c’est fini. Je travaille. Je me suis mise au travail, mais comment faire avec onze projets dans les pattes, c’est un peu comme si j’avais onze enfants, et que je les aimais tous, même si certains sont (apparemment) moins réussis que d’autres. Qu’ils se disputent, s’ignorent, se copient, peut-être à mon insu. Que s’ils ne m’usent pas les nerfs, il faudra quand même les forcer à grandir, à se séparer de moi, et à vivre une vie qui pourrait bien être…