#EncoreUnePhotoPriseAvecUnTéléphoneDansLeNoir
On lit, un peu dans la lumière, beaucoup dans le noir. On lit comme on pourrait parler, sauf qu’on est accompagné par des musiciens, et on ne leur en veut pas de nous couper un peu la parole, même on essaie de se taire en même temps qu’on lit. Pour les écouter. Ils sont plutôt patients, avec tous ces mots qu’on lit, ils attendent qu’on parle, alors il faut s’y remettre, et si on sait y faire, on peut improviser, sinon le nez sur le papier, et que ça prose, et à un moment, on ne sait plus trop qui est en train de raconter l’histoire. Surtout que ça défile, sur la scène, il y a des amateurs de mise en situation et des furieux de contradictions. Et ça dure comme ça, et parfois les voix sont pas bien posées dans les micros et ça sature, mais le public ne se plaint pas. Ne jette pas de tomates. Applaudit poliment, quand ça se termine, et reste encore un peu. On lit et après on retourne s’asseoir, et si vous aimez lire, et que vous aimez vous asseoir, il est possible que la prochaine fois, on se croise. Et qu’on ne se voit pas.
« Alors, dans un ordre dispersé, corps isolés et pensées muettes, nous repartons. On ne s’entend pas et on ne voit toujours rien. L’obscurité, à elle toute seule, suffirait à nous décourager, mais ce sont les cris et les murs, qui nous chassent. Dehors, les illuminés. Dehors les chercheurs d’avenir. Dehors les gentils, les bavards et les géomètres. Nous voici de retour du côté de la lumière, dans le couloir retrouvé. Plus personne ne parle, et tout le monde se suit. Nos oreilles se vident, et nous refranchissons les tentures, décidés, comme si nous savions exactement ce que nous étions en train de faire. » Griz années2000
Spoken words addict du 25 sept 2014, Cercle des voyageurs